« EAU POUR TOUS » – BERTOUA

Ville de Bertoua, Cameroun.

La ville de Bertoua, chef-lieu de la région de l’Est, fait face à une situation critique en matière d’accès à l’eau potable. C’est ce qu’a révélé l’ONG Actions for Development and Empowerment (ADE) lors d’une conférence de presse organisée le 02 novembre 2023. Selon cette organisation, la gouvernance de l’eau dans la ville est inefficace et ne répond pas aux besoins locaux.

ADE mène une recherche sur la gouvernance de l’eau dans la ville de Bertoua, dans le cadre de son projet intitulé « Eau Pour Tous », financé par le Global GreenGrants Fund. Ce projet vise à évaluer l’efficacité de la gouvernance de l’eau au lendemain du projet de réhabilitation, de renforcement et d’extension du système d’alimentation en eau potable de la ville de Bertoua, projet financé en 2017 à hauteur de 15,8 Milliards de Francs CFA par le gouvernement Camerounais en collaboration avec l’Agence Française pour le Développement (AFD) et la Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement (BERD).

Les résultats de la recherche ont montré que la gouvernance de l’eau dans la ville de Bertoua présente plusieurs défis tels que : la non-conformité de la qualité de l’eau d’adduction publique aux normes prescrites par l’OMS, ce qui expose les consommateurs à des risques sanitaires ; le faible taux de connexion au réseau d’approvisionnement en eau de la CAMWATER, qui n’atteint que 7% de la population ciblée par la recherche. La majorité des citoyens ont recours à des sources alternatives d’eau, telles que les puits, les forages, les sources et les rivières, qui ne sont pas toujours potables et qui nécessitent des traitements coûteux et peu accessibles ; la persistance des maladies hydriques, comme le paludisme, la fièvre typhoïde, la dysenterie amibienne et autres, qui affectent la santé et le bien-être des populations ; le coût élevé des branchements sociaux, qui constitue un obstacle majeur pour l’accès à l’eau potable, surtout pour les couches les plus vulnérables de la société, composées majoritairement de cultivateurs et de ménagères ; l’insuffisance des financements des mairies pour assurer la maintenance des forages équipés de pompes à motricité humaines et des sources aménagées, qui sont souvent laissés à l’abandon ou détériorés par le manque d’entretien ; la non-opérationnalité du Conseil régional de l’Est dans le secteur de l’eau, causée par le manque de ressources humaines et financières, qui limite son rôle de coordination et de supervision des actions menées par les différents acteurs locaux ; la faible collaboration entre les différentes mairies et la CAMWATER, qui donne lieu à des conflits qui mettent à mal l’accès des citoyens à une eau saine et potable.

Par ailleurs, les politiques publiques locales visent principalement à améliorer le bien-être des citoyens. Cependant, il est observé sur le terrain que ces derniers mettent en œuvre des initiatives au niveau local sans se conformer aux réglementations en vigueur. Cela se manifeste notamment par la construction anarchique de puits et la distribution d’eau de ces puits aux résidents locaux sans respecter les lois et réglementations relatives à la distribution de l’eau.

Pour pallier à ces manquements, la délégation régionale de l’Est de la CAMWATER a mis en place des initiatives louables pour assurer l’accès des citoyens à l’eau potable. Cependant, il est possible de renforcer l’impact de cette institution dans la vie quotidienne des citoyens en mettant en œuvre certaines pratiques, notamment : le renforcement de la coopération avec les communes pour élaborer des politiques concertées et faciliter leur mise en œuvre, en particulier pour le bien-être des citoyens des communes de Bertoua 1er et de Bertoua 2e, ou encore la reconstruction des bornes-fontaines dans les quartiers de Bertoua 2 et de Ngaikada, dont la gestion sera déléguée aux chefs traditionnels ou aux chefs de blocs locaux. Cela responsabiliserait les citoyens et les impliquerait dans la gestion de l’eau, faisant d’eux des relais communautaires pour les politiques de l’institution.

Toutefois, ADE formule plusieurs recommandations pour améliorer la gouvernance de l’eau dans la ville de Bertoua, notamment :

• Renforcer le contrôle de la qualité de l’eau d’adduction publique et sensibiliser les consommateurs sur les normes et les procédures à suivre pour garantir la potabilité de l’eau.

• Augmenter le taux de connexion au réseau d’approvisionnement en eau de la CAMWATER, en réduisant le coût des branchements sociaux et en facilitant les démarches administratives pour les demandeurs.

• Promouvoir l’utilisation des sources alternatives d’eau, en assurant leur maintenance, leur protection et leur traitement, et en éduquant les utilisateurs sur les bonnes pratiques d’hygiène et de gestion de l’eau.

• Lutter contre les maladies hydriques, en renforçant les services de santé publique, en distribuant des kits de prévention et de traitement, et en impliquant les communautés dans la surveillance et la détection des cas.

• Mobiliser des ressources financières supplémentaires pour le secteur de l’eau, en sollicitant l’appui des partenaires techniques et financiers, en diversifiant les sources de financement, et en optimisant l’utilisation des fonds disponibles.

• Rendre opérationnel le Conseil régional de l’Est dans le secteur de l’eau, en dotant cette institution des moyens humains et matériels nécessaires pour assurer sa mission de coordination et de supervision des actions menées par les différents acteurs locaux.

• Améliorer la collaboration entre les différentes mairies et la CAMWATER, en instaurant un dialogue permanent, en harmonisant les politiques et les stratégies, et en résolvant les conflits par des mécanismes pacifiques et participatifs.

ADE appelle les autorités compétentes, les acteurs de la société civile, les médias et les citoyens à se mobiliser pour faire de l’accès à l’eau potable une priorité nationale et locale, et à s’engager dans la mise en œuvre des recommandations formulées. L’ONG exprime également sa volonté de continuer à œuvrer pour la promotion du droit à l’eau pour tous, en menant des actions de plaidoyer, de sensibilisation, de renforcement des capacités, de recherche et de suivi-évaluation.

Elsa CHEPING & Odetta NKWA

Posted by Yoheda

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