L’impact de la désinformation en période électorale sur la santé mentale des électeurs

Clap de fin sur la deuxième édition de l’AFFCameroon conférence qui s’est tenue du 27 au 28 mars 2024, à Yaoundé. A l’approche des élections au Cameroun en 2025, les échanges ont porté sur la désinformation en contexte électoral.

La désinformation en période électorale a non seulement des conséquences sociales, mais aussi des conséquences sur le plan de la santé, en occurrence sur la psychologie des électeurs. C’est dans cet ordre d’idée que Defyhatenow a organisé une table ronde sur le thème : « Santé mentale et désinformation en période électorale : analyse des dangers des fake news sur la psychologie des électeurs ». La modération des échanges a été assurée par Boutchouang Nghomsi Chancelin, économiste et entrepreneur.

L’exposition aux contenus des réseaux sociaux influent sur notre santé mentale

Fidèle Djebba, psychologue, est la première à prendre la parole en plantant le cadre de la santé mentale, de l’influence des Fake news et des réseaux sociaux sur le comportement des électeurs. L’on retient que les réseaux sociaux ont brisé les barrières sociales qui existaient. En plus, elle indique que la libéralisation de l’information à travers les réseaux sociaux s’accompagne du libertinage en donnant la capacité de véhiculer des informations, de créer des contenus qui ne sont pas toujours vrais ou vérifiés et qui représentent un danger surtout en période électorale. Le fait qu’on soit donc exposé à la pléthore d’information de manière tous azimuts, n’est pas sans danger pour la santé mentale des internautes. Cette exposition répétitive peut nous amener à tout croire, à tout valider et influence notre santé mentale. On perd la faculté critique face aux informations que nous recevons et on court le risque de subir la désinformation ou de la véhiculer.  Elle invite les potentiels électeurs à la vigilance face aux manipulations sur l’espace numérique. « Il est important pour électeurs de na pas minimiser le pouvoir des mots, des discours et le pouvoir des images. On croit que c’est anodin, mais ce n’est pas anodin. Le fait que je choisisse de présenter telle image plutôt que telle autre  a pour but e fait de vous amener à me voir de telle ou de telle autre manière. Bientôt on va assister à toute cette propagande. Il y aura des affiches, des discours sur les chaines de télévision. Mais ne prenons pour acquis tout ce qui est dit. Revenons sur nos pensées critiques, cette capacité qu’offre l’esprit scientifique de réfléchir, de vérifier, d’analyser avant d’accepter ou alors avant même de diffuser ou de relayer une quelconque information », conseille l’actrice de la société civile. Chacun doit être suffisamment averti et rester sur ses gardes.

La peur, origine des problèmes de santé mentale

Le Dr Albert Ze, membre du panel déplore le fait que la santé mentale n’a pas de place dans le système de santé au Cameroun. Pour lui, elle est juste mentionnée comme plusieurs autres activités dans notre système de santé. Il prend pour indicateur, le fait qu’on rencontre de plus en plus dans nos rues des personnes en situation de déséquilibre mental. Le chercheur attaque la racine même qui cause les problèmes de santé mentale qui est la peur selon lui. « La peur est à l’origine des problèmes de santé mentale », déclare l’économiste de la santé. Cette peur est manifestée par l’abondance des mauvaises informations qui sécrètent les éléments de la peur. En période électorale, on n’échappera pas à cette réalité. Face à cela, il propose des actions à deux niveaux. Le premier  est celui  la conception d’un véritable contenu de promotion de la santé mentale au sein de notre système de santé. Il faut trouver des moyens et des mécanismes pour que la peur ne remonte pas au niveau de la population à travers la promotion de la santé mentale. Le deuxième niveau est une interpellation des journalistes qui selon lui créé les influenceurs. Il justifie cela par le fait que la majeure partie des invités dans les supports médiatiques sont des influenceurs qui polluent quelque part, l’environnement dans lequel nous vivons. Il faut faire la promotion de ce qui est positif et qui peut permettre aux gens d’entre dans leur assiette ou santé mentale. Dans ce sens, les journalistes doivent jouer leur rôle d’acteurs clés dans la perspective des élections à venir.

Le rôle des biais cognitifs dans la perturbation de la santé mentale

Après le Dr Albert Zé, le Dr Hemes Nkwa, médecin épidémiologiste de terrain, factcheckeuse santé, a pris la parole. Dans son propos liminaire, elle reconnait comme le précédent panéliste le fait que la santé mentale passe souvent inaperçue, pourtant elle est prise en compte dans la définition de l’OMS de la santé. La santé mentale est indissociable de la santé physique et la santé sociale. Lorsqu’on se porte bien du point de vue mental, cela a des répercussions sur le plan physique et social. Et vice versa.  En intégrant les aspects précédemment évoqués qui ont des répercussions sur la santé mentale, elle ajoute l’élément des biais cognitifs. « Tout être humain est exposé aux biais cognitifs », reconnait la spécialiste de santé. Ce sont des prédispositions qui nous rendent vulnérables face aux informations, à une situation. Nous croyons souvent décider seul, mais ce n’est pas toujours le cas. Parmi les biais cognitifs, elle s’est appesantie sur deux biais, le billet de négativité et de confirmation. Le biais de négativité rend sensible à ce qui est mauvais comme nouvelle et le biais de confirmation facilite la croyance en quelque chose qu’on est disposé à croire. Elle par ailleurs d’autres influences sur la santé mentale, comme le stress, l’anxiété, la dépression et tout ce qui peut être trouble de santé mentale. Pour ne pas être affecté constamment, elle propose de faire souvent des cures de médias, de réseaux sociaux. En dehors de ceux-ci, il y a aussi la stigmatisation et la discrimination qui peuvent affecter la santé mentale. En période électorale, cela augmente les clivages sur les réseaux sociaux. La plus grande conséquence est la fragilisation de la prise de décision marquée par la guerre de l’information qui vise à modifier notre jugement vis-à-vis d’un candidat.  Comme solution, il faut accentuer l’éducation aux médias et à l’information. Cela permettra d’éviter d’altérer notre santé mentale et celle d’autrui.  En portant atteinte à la santé mentale du prochain, on est coupable de ce qui adviendra comme conséquence. Pensons, réfléchissons avant de cliquer ou partager.

Le dernier intervenant à prendre la parole est le Dr Fabrice Tchindé. Avec un intérêt pour la santé communautaire et la santé numérique, il estime que la communauté doit prendre soins d’elle-même et non de confier la responsabilité à quelqu’un d’autre. Il faut donc être éligible pour parler des élections, c’est ce que le Dr Tchindé appelle l’empowerment. Il convoque également la notion de neutralité des médias dans l’information en contexte électoral pour éviter de dérouter le potentiel électeur. Il faut travailler sur notre santé mentale qui ne coute pas chère en termes de prise en charge. Il faut se dire qu’on est capable de faire à la désinformation pour nettoyer notre santé mentale.  Il faut travailler sur soi et autour de soi. Il conseille de se projeter sur le futur. Il invite les hommes des médias à prendre conscience de l’influence qu’ils ont au sein d’une communauté afin de ne pas être utilisé pour porter atteinte à la santé mentale des récepteurs.

Posted by Yoheda

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